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Cultura e religione dell’acqua rassemble les communications présentées lors du colloque interdisciplinaire qui s’est tenu à l’université de Messine en mars 2011. L’ouvrage est paru en 2012 : il faut donc saluer la rapidité avec laquelle A. Calderone a publié les communications de ce colloque.

Ce volume de 433 pages et 40 planches d’illustrations (en N&B, ce qui est parfois dommage) est riche de 26 articles dont le point commun est la place de l’eau dans la civilisation et la religion de l’antiquité à l’époque moderne (et même jusqu’à aujourd’hui avec les deux derniers articles), avec un intérêt particulier pour la Sicile et l’Italie du Sud à l’époque gréco-romaine. Malgré l’approche pluridisciplinaire et diachronique de ce sujet en lui-même très vaste, cette focalisation régionale et temporelle permet à l’ouvrage d’éviter un écueil majeur, celui de la dispersion et du manque de cohérence. En outre, les communications ont été judicieusement regroupées en cinq thèmes : 1) Témoignages issus des sources textuelles (poésie et mythe) ; 2) Le monde des images ; 3) Les lieux de culte et les manifestations rituelles ; 4) L’eau comme moyen de mise en relation ou de séparation ; 5) Utilisation et gestion de l’eau : la dimension sociale et politique.

1) La première partie, relative à l’eau dans les sources textuelles, comprend cinq articles. Maria Cannatà Fera (« Acqua e poesia nella Grecia antiqua », p. 3-16) s’intéresse au rapport entre l’eau et la poésie, mais se limite à certains thèmes eu égard à l’ampleur du sujet. Les différentes qualités de l’eau sont énumérées par Athénée, dans le Banquet des sophistes, dont il attribue la liste à Homère. L’opposition entre eau douce et eau saumâtre est utilisée par Socrate pour parler de l’Amour, et par Plutarque pour comparer la bonne et la mauvaise musique. L’A. étudie ensuite la métaphore de la soif chez Pindare, et montre combien l’eau des sources pures sert dans de nombreuses épigrammes de … source d’inspiration poétique, au même titre que le vin ou la musique chez d’autres poètes. L’excellence de l’eau (ἄριστον μὲν ὕδωρ) est évoquée dans la poésie durant toute l’antiquité : l’A. cite ainsi une épigramme du début de l’époque byzantine (VIe siècle ?), en hexamètres, mentionnant la restauration d’un aqueduc de Stratonicée (AE, 2008, 1400).

À partir des textes médicaux grecs, Valeria Andò (« Come una spugna. Umidità del femminile nel pensiero medico e biologico della Grecia classica », p. 17-26) étudie « l’humidité » féminine qui, au même titre que la faiblesse ou le froid, est la marque du corps féminin et le signe de sa « négativité », et de son infériorité par rapport au corps masculin ; mais cette « humidité » est aussi ce qui lui permet de remplir ses fonctions biologiques spécifiques (menstrues, grossesse, accouchement, puerpéralité). Le premier chapitre de l’ouvrage Sur les maladies de la femme du Corpus hippocraticum décrit ainsi la femme comme une éponge. Cet excès d’humidité doit être évacué par la katharsis menstruelle qui, si elle ne survient pas, entraine de graves maladies. Lors de la grossesse, l’humidité de la femme, alors comparée à la terre, permet de nourrir l’embryon. La « mécanique des fluides » du corps féminin est décrite comme une perpétuelle recherche d’équilibre.

La contribution de Sotera Fornaro (« Sulla metafora del pozzo (a partire da un Inno omerico », p. 27-34) s’appuie sur les vers 98-100 de l’Hymne homérique à Déméter pour étudier la métaphore du puits. Déméter, dont la fille vient d’être ravie par Hadès, se lamente auprès du puits « des vierges » (parthenios) d’Eleusis : ce puits, qui sert habituellement de cadre aux discours amoureux, devient triste, comparable à un tombeau. L’A. convoque plusieurs auteurs contemporains (D’Annunzio, Pirandello…) pour illustrer l’image du puits dans l’imaginaire collectif : « puits sans fond » dans lequel sombrent les espoirs, image de stabilité et de certitude, tentation irrésistible mais dangereuse, etc.

Concetta Giuffré Scibona (« Osservazioni sul valore liminale dell’acqua nella religione greca », p. 35-50) rappelle que, dans l’imaginaire grecque depuis la fin de l’époque archaïque, la frontière entre les trois niveaux verticaux du Cosmos (céleste, siège de Zeus ; humain ; chthonien, siège des divinités infernales) est formée par l’eau, comme le montrent des vers d’Homère et d’Hésiode et certaines représentations sur vases. La poésie met également en évidence le rôle que joue l’eau comme limite horizontale : Okeanos-Pontos marque la frontière entre l’oikoumene et un monde marginal, habité de figures de l’altérité, voire de monstres. L’A. étudie ce thème à travers plusieurs Hymnes homériques, puis passe à l’analyse des passages possibles à travers l’eau et les confins qu’elle délimite dans les pinakes votifs de Perséphone et Déméter du sanctuaire de Locri Epizefiri en Calabre (Ve s. av. J.-C.).

Concetta Masseria (« Verso un altro mare, con incerto tragitto. Hera e la metopa con “l’eroe sulla tartaruga” », p. 51-72), après avoir rappelé le rapport étroit de la déesse Héra avec l’eau (sanctuaires placés près du cours des fleuves, sur les littoraux, objets votifs en forme de bateaux, etc.), étudie la plus étonnante des métopes du temple de l’Héraion de Foce del Sele qui représente un personnage chevauchant une tortue. L’A. rappelle les différentes propositions faites, pas toujours convaincantes d’après elle, pour identifier le personnage et interpréter la scène à partir d’un certain nombre de passages littéraires. Elle propose de prendre en considération les données archéologiques relatives aux tortues : carapaces offertes en offrandes dans des sanctuaires ou déposées en contexte funéraire, tortues faites en céramique, ivoire, bronze ou même en bois si l’on en croit les sources littéraires, et objets réalisés dans des carapaces de tortues. Or la tortue-lyre accompagnait le voyage des morts vers l’au-delà. L’A. propose donc de voir dans le personnage non pas un héros mais un dieu, Hermès Psychopompos, en compagnie de la tortue avec laquelle il traverse sur le fleuve des morts. Le relief de la métope serait le paradigme du voyage ultime des défunts.

2) La deuxième partie intitulée « Nell’universo delle immagini » traite d’iconographie. L’article de Claudia Lucchese (« Navi e naukraroi sui vasi attici di VIII e VII sec. a.C. », p. 73-88) étudie les représentations de bateaux et de naukraroi sur les céramiques attiques des VIIIe et VIIe s. av. J.-C., en particulier les cratères géométriques du Metropolitan Museum of Art (cat. 34.11.2) et du Louvre (cat. A 516-517-527-539/540). La représentation de bateaux, marins, scènes de batailles navales et autres épisodes de la vie en mer ne doit pas automatiquement conduire à penser que le propriétaire du vase était un naukraros ; en revanche, la position sociale assurée par la possession d’un bateau dans l’Attique des VIIIe et VIIe s. av. J.-C. suggère que la représentation de telles scènes a une forte valeur symbolique dans le répertoire des symboles tardo-géométriques et proto-attiques car ces images renvoient au statut aristocratique.

Carmela Roscino (« L’acqua e il sacro nella Nekyia di Polignoto a Delfi », p. 89-102) étudie la place de l’eau dans le cycle peint, dans les années 465-460 av. J.-C., par Polygnote de Thasos, dans la lesche (salle de réunion) offerte par les Cnidiens dans le sanctuaire d’Apollon à Delphes. Elle s’intéresse à la Nekyia qui était peinte en vis-à-vis de l’Ilioupersis, où l’eau occupait un rôle majeur puisqu’elle encadrait et délimitait entièrement la composition.

Chiara Pilo (« L’hydria tra uso pratico e valore simbolico. Il contributo della documentazione iconografica », p. 103-112) présente une étude sur l’utilisation pratique et la valeur symbolique de l’hydrie, qui était destinée à contenir l’eau (puiser, transporter, verser). L’ΥΔΡΙΗ ΜΕΤΡΙΗ (hydrie juste) de Gravisca servait de mesure. Note sur l’usage de kalpis. Les représentations montrant des hydries permettent de savoir comment elles étaient manipulées et portées. Les hydries sont représentées dans des scènes de la vie quotidienne de « femmes à la fontaine » et des scènes mythologiques qui se déroulent devant des sources ou des fontaines (Cadmos et le dragon, Amymonè, etc.). Elles apparaissent aussi sur des scènes de vendanges, portées par des Satires ou des Ménades. L’eau par les valeurs purificatrices et fertilisantes qui lui étaient attribuées joue un rôle dans l’acquisition de la charis (charme), qui a pour finalité l’union sexuelle et matrimoniale : il faut y rattacher les scènes de femmes à la toilette ou représentant Aphrodite, modèle de toutes les épouses. Il faut y ajouter l’usage funéraire, bien attesté par des représentations sur des lécythes à fond blanc (libations d’eau devant la tombe, lavage du mort), et aussi agonistique, puisque des hydries étaient offertes comme prix dans les lampadedromie (courses aux flambeaux) et concours musicaux.

Dans le prolongement de l’article précédent, Francesca Silvestrelli (« Donne al louterion nella ceramica apula e lucana », p. 113-124) étudie les représentations de femmes devant un louterion (scènes de femmes à la toilette et de femmes au bain) dans la céramique apulienne et lucanienne. Elle s’attache aux formes vasculaires que sont les pelikes et les krateres

Grazia Salamone (« Potamos e polis : iconografie monetali dell’Occidente Greco. Alcune riflessioni », p. 125-140) s’attache au motif « aquatique » des frappes monétaires des cités de l’Occident grec, la polis se définissant alors par rapport au potamos (cours d’eau). Rivières et fleuves sont représentés sous la forme d’humains, d’animaux ou de monstres comme les taureaux à tête humaine ou les éphèbes cornus. Ces deux figures accompagnent souvent des nymphes éponymes de cités (Pandosia, Kamarina, etc.) et représentent le fleuve et la cité, qui sont deux indicateurs géo-politiques incarnant l’occupation coloniale : la chora (base économique de la colonie) et la polis (cœur de la communauté).

3) La troisième partie est intitulée « Tra luoghi di culto e manifestazioni rituali » et regroupe les communications traitant des manifestations cultuelles et rituelles relatives à l’eau.

La contribution de Monica de Cesare (« Le nymphai e l’acqua in Sicilia : l’imagerie vascolare », p. 141-168) examine, à travers la céramique siciliote, les représentations féminines en relation avec l’eau. Les scènes, multiples, montrent que l’eau est l’élément à travers lequel la femme accomplit toutes les étapes biologiques de sa vie, de la naissance à la mort en passant par l’accès à la maturité sexuelle, le mariage et la maternité. Dans ces scènes, le statut matrimonial de la femme est valorisé et joue un rôle central dans l’acquisition d’une identité sociale.

Elisa Chiara Portale (« Le nymphai e l’acqua in Sicilia : contesti rituali e morfologia dei votivi », p. 169-192) poursuit sur le thème de l’eau et des nymphai, en abordant les pratiques rituelles et la morphologie des installations hydrauliques (fontaines, réservoirs, vasques) et des objets votifs des sanctuaires siciliens d’Agrigente et de Syracuse. Un intérêt particulier est porté au « Sanctuaire Rupestre » de Rupe Atenea à Agrigente, qui disposait de grottes et d’installations hydrauliques : les offrandes (céramiques miniatures, petits bustes) sont en relation étroite avec la fertilité végétale et humaine. Les bustes en terre cuite incarnent le concept de nymphe, figure « en devenir » mais encore « inachevée ».

La contribution de Caterina Greco et de Valeria Tardo (« A proposito dei santuari lungo il fiume Modione a Selinunte », p. 193-206) examine la topographie de Sélinonte sous l’angle des cours d’eau qui définissent les limites de la cité et de la « ceinture sacrée » des sanctuaires extra-urbains situés à l’Est comme à l’Ouest de la colonie. Les A. étudient la séquence des sanctuaires qui se sont développés le long de l’ancien Selinous (actuel fleuve Modione), dont le cours a évolué au fil du temps et qui donna son nom à la cité ; elles étudient, grâce à des cartes du XIXe et du début du XXe siècle, la relation spatiale existant entre le fleuve et la « fontaine » proche du « Temple M ».

Anna Calderone (« Una vasca gradinata a Monte Saraceno. Funzione e contesto », p. 207-220) présente un réservoir (6,30 x 3,85 m, prof. 2,70 m) récemment mis au jour à Monte Saraceno (Ravanusa), en Sicile et daté entre le milieu du Ve s. av. J.-C. et la première moitié du IIIe s. av. J.-C. Ce réservoir, en grande partie creusé dans le rocher, a la particularité de présenter des marches permettant d’accéder jusqu’au fond et d’être connecté avec une citerne. L’A. propose de voir dans ce réservoir un bassin servant à l’élevage de poissons utilisés non pour l’alimentation mais dans des pratiques rituelles (ichthyomancie).

La contribution de Francesca Pizzi (« L’acqua delle Ninfe. Il caso “complesso” di Locri », p. 221-234) étudie les types de céramique déposées en ex-votos dans le cadre du culte des Nymphes – divinités qui assuraient le passage de la jeune fille de l’état de parthenos à celui de nymphe – de la Grotta Caruso à Locres Epizéphyres, fréquentée sans interruption du début du IVe s. jusqu’à la moitié du IIe s. av. J.-C. À partir de ces offrandes et des caractéristiques de l’aire cultuelle, qu’elle confronte à des sources textuelles, l’A. restitue les étapes de la liturgie (entrée dans l’antre à travers le choros ; offrandes et sacrifices ; bain rituel ; passage).

Franca C. Papparella (« Acqua e contenitori : simbologia e significato nella cristianità », p. 235-246) s’intéresse au rôle de l’eau dans le monde chrétien et dans sa liturgie en proposant une confrontation entre les sources écrites, où le thème de l’eau a été bien étudié (eau purifiante dans le Lévitique, eau comme lieu de la manifestation de Dieu-Yahwè dans la Genèse), et les données iconographiques de l’art paléochrétien. Différents thèmes (le déluge, le baptême, la guérison de l’aveugle …) ou personnages (Noé, Moïse, Jonas …) liés à l’eau sont étudiés

4) La quatrième partie, intitulée « Via di relazione, via di separazione » rassemble les contributions qui traitent de l’eau comme moyen de mise en relation ou moyen de séparation.

Caterina Ingoglia (« La Valle del Patrì un corridoio obbligato tra Tirreno e Ionio ? », p. 247-270) étudie la vallée du Patrì dans le N.-E. de la Sicile, où les habitants parlent encore aujourd’hui un dialecte gallo-italien datant de la présence des Normands sur l’île. L’A. met en évidence le rôle de la rivière et de sa vallée dans le déplacement et la communication des personnes depuis l’Antiquité car elles fonctionnent comme un « couloir » de passage entre la mer tyrrhénienne et la mer ionienne. Cette vallée a servi à la circulation des bêtes (ressources agro-pastorales) et au transport des ressources minières dont la région est riche.

Elisabetta Tramontana (« Fiumi e sorgenti. L’importanza dell’acqua nel sistema insediativo della Sicilia centro-meridionale indigena », p. 271-300) étudie la place des cours d’eau et l’importance des sources en Sicile centro-méridionale. À l’âge du Fer, dans cette zone où l’eau des fleuves (Platani, Gela et Imera Sud) est de mauvaise qualité et où des installations hydrauliques, non attestées, ne semblent pas avoir été construites, les sources ont joué un rôle fondamental dans le choix de l’emplacement des sites d’habitat dont l’expansion s’est faite depuis les côtes vers l’intérieur des terres, en particulier à partir de l’installation des colonies grecques. Durant toute la période, la population autochtone a eu pour objectif de contrôler les vallées fluviales, grâce auxquelles il était possible d’atteindre les différentes parties de l’île.

Une étude similaire est conduite par Francesca Spatafora (« Le vie dell’acqua : città e villaggi nelle vallate fluviali della Sicilia centro-occidentale tra età arcaica ed ellenismo », p. 301-314) dans la zone centre-ouest de la Sicile, entre Palerme et Cefalù, de la période archaïque à l’époque hellénistique. De profondes vallées fournissaient des ressources vivrières et servaient également de voies de communication. La destruction d’Himera en 409 av. J.-C. (Diodore de Sicile XIII, 59) précéda la fondation de Thermai Himeraiai près de sources chaudes qui vit la réorganisation de l’habitat dispersé le long de la côte orientale de la rivière San Leonardo. Après l’annexion romaine de 241 av. J.-C., on observe en revanche une nouvelle « explosion de l’habitat rural ».

Lucia Fernanda Ruffo (« Attraversare l’acqua. Ritualità e manufatti », p. 315-324) rappelle combien les fleuves et autres cours d’eau ont toujours constitué des obstacles à la circulation. Au Moyen Âge, les ponts, qui transforment la nature, sont donc perçus comme des miracles ou des sacrilèges (« ponts du diable »). D’abord construits en bois, puis en dur à partir de la seconde moitié du XIIIe siècle, ils sont financés par des droits de passage (péage) et entretiennent des liens étroits avec les monastères.

Daniela Scortecci (« Aspetti delle “culture d’oltre-mare” nell’Italia altomedievale », p. 325-342) montre combien la mer fut, entre la fin de l’empire romain et l’époque carolingienne, un moyen d’échange entre les peuples du Nord et les civilisations orientales, processus d’acculturation où le sol italien fut en première ligne en raison de l’importance des flux migratoires. De ces échanges sont nées de nouvelles identités collectives, des gentes à caractère ethnique varié, comme les Lombards, dont un certain nombre de « lieux de pouvoir » sont ici présentés.

5) La cinquième partie (« Tra uso e gestione : la dimensione sociale e politica ») regroupe les contributions traitant de la dimension sociale et politique de l’utilisation et de la gestion de l’eau.

Grazia Spagnolo (« Risorse naturali e approvvigionamento idrico a Gela in età greca », p. 343-374) étudie les ressources naturelles et l’approvisionnement en eau de Géla à l’époque grecque. La cité aurait tiré son nom du fleuve Gélas (Thuc., VI, 4, 3) qui apparaît personnifié sur les monnaies dès le Ve s. av. J.-C. L’A. confronte les sources antiques parlant du fleuve et des étangs du territoire de Géla avec des documents (textes, cartes) plus récents, médiévaux et modernes, afin de connaître l’évolution du cours du fleuve et la variation de l’étendue des étangs. Elle prouve l’existence, à l’époque antique et médiévale, d’une branche occidentale du Gélas. Dans cette cité célèbre pour son absence de sources et sa pénurie en eau potable, l’A. étudie ensuite la répartition des puits aux époques archaïque et classique, et des citernes de l’époque hellénistique, le captage de l’eau de la nappe phréatique et la récupération des eaux pluviales étant les seules ressources hydriques possibles. Au lieu-dit « Orto Fontanelle », l’A. suppose l’existence d’un sanctuaire d’Héra, doté de puits au VIe-Ve s. av. J.-C. ; l’endroit fut ensuite occupé par des maisons à l’époque hellénistique qui semblent avoir utilisé des puits, tout en améliorant leurs ressources en eau par la construction de citernes en forme de bouteilles.

Dans sa contribution, Anna Maria Prestianni Giallombardo (« L’acqua come elemento fondamentale nell’organizzazione e nel controllo del territorio e dello spazio urbano. Il caso di Alesa », p. 375-398) étudie, à partir de la Tabula Halaesina (IG, XIV, 352), inscription cadastrale fragmentaire du IIIe-IIe s. av. J.-C., les rivières et les aqueducs comme éléments d’organisation et de structuration de la ville d’Alesa et des établissements ruraux des environs. La Tabula offre une hiérarchisation des cours d’eau (fleuves et rivières ; cours d’eau secondaires et dérivations), et mentionne également des « sources », des « fontaines » et des « bains » (krana, balaneion). L’A. tente de reconstituer la « topographie » donnée par la Tabula, qui semble proposer une classification des eaux en fonction de leur origine, ce qui les destine donc à différents usages (consommation, irrigation). L’A. propose d’identifier le rhous Alaisos avec le cours d’eau actuellement dénommé Tusa et non avec l’Aleso, rivière majeure de la région. L’A. évoque au fil du texte différents vestiges d’installations hydrauliques (aqueduc hellénistique, canalisations en terre cuite ou en plomb …). Elle propose d’interpréter le terme rhis (« nez, narine ») de la Tabula comme des débouchés de rigoles et caniveaux ménagés dans les tours des remparts pour évacuer l’eau hors de la cité.

Adele Coscarella (« Insediamenti fortificati e rupestri della Calabria médiévale : scelte e gestione delle risorse idriche », p. 399-412) propose une étude de la typologie et des principales techniques de réalisation des systèmes d’approvisionnement en eau – essentiellement des citernes – présents dans une série de sites d’habitat fortifiés et rupestres (castelli) de la Calabre à l’époque médiévale tardive : forteresse de San Niceto, sites de Bova, Amendolea et Motta Anomeri, et site rupestre de Zungri.

Paola de Sanctis Ricciardone (« Il mare invisibile. Paesaggio e degrado nell’alto Tirreno cosentino », p. 413-424) fait le bilan, inquiétant, des dégradations qu’a causées l’urbanisation non maîtrisée des dernières décennies sur les paysages littoraux de la Calabre.

Selon les mêmes perspectives que la contribution précédente, Gloria di Rosa (« Paesaggi costieri : voci, sguardi e cemento », p. 425-433) conclut le volume avec une étude des relations existant actuellement entre l’urbanisme et la mer sur les côtes calabraises, défigurées par le béton.

Sandrine Agusta-Boularot

Publié en ligne le 4 septembre 2015.